Ce n’est pas un moratoire, mais cela y ressemble furieusement. Le gouvernement québécois, jusqu’alors persuadé du bien-fondé de l’exploitation du gaz de schiste, s’est rangé à l’avis du rapport du Bureau d’Audiences publiques sur l’environnement (Bape). Lequel demande une véritable évaluation des risques avant de poursuivre (même si certaines explorations vont se poursuivre). On sent ici un "ouf" généralisé, un "ouf" qui s’exprime partout à travers la presse, un "ouf" qui ne raconte pas seulement la (petite) victoire écologique, mais une valeur typiquement québécoise qu’on explique ci-dessous.
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Il y a d’un côté l’info pure, ici commentée par les (excellents) journalistes du "Devoir", qui révèle que le gouvernement Charest, qui s’était jusqu’alors littéralement vendu à bas prix aux "gazières’ comme on dit ici, et fait marche arrière pour cause de tollé général et de rapport malin et précis. Il y a le soulagement des écolos, qui croisent les doigts pour que ce pas en arrière finisse par signifier un arrêt total des projets d’exploitation.
Mais il y a aussi, et c’est passionnant, l’expression d’une valeur québécoise essentielle, symbolisée par l’ONG "Maîtres chez nous". Malmenés par l’Histoire, combattants acharnés pour leur indépendance culturelle et politique, assiégés par l’océan anglophone et libéral qui les entoure en Amérique du Nord, les Québécois font entendre une musique singulière qui relie identité culturelle et indépendance énergétique. Hydro-Québec, l’entreprise nationale d’hydro-électricité, fleuron absolu, dit bien cette volonté ancestrale de ne pas vendre les sous-sols et les ressources au privé - ce que, précisément, les libéraux au pouvoir ont fait avec les gaz de schiste, perdant énormément d’argent au passage...
Alors voilà : on est ici au coeur de ce qu’est l’écologie ; non pas une simple histoire de protection de l’environnement, mais bel et bien une volonté de reprendre la barre, d’avoir la main sur son destin. Pas mal.